L'Express/Feuille d'avis de Neuchâtel
28 septembre 1976

William Sheller à la rencontre d'une musique
universelle


William Sheller, aujourd’hui, connaît une notoriété qui peut paraître surprenante aux yeux de certains. Pourtant, lorsqu’on connaît un peu mieux l’homme, et surtout le musicien, cette notoriété s’explique aisément. William est né pour la musique et surtout avec la musique. une famille d’artistes : un père musicien (de jazz), un grand-père décorateur, sans oublier (pour le côté pittoresque) une grand-mère voyante qui lui prédit d’ailleurs, dès son plus jeune âge, une grande carrière musicale.

Les USA, la France et L’Opéra

Né à Paris, le 9 juillet 1946, d’un père américain et d’une mère française, William ne doit son prénom qu’à un fâcheux concours de circonstances :
– « Bébé, j’avais la tête en forme de poire, dit-il. Mes parents ne s’en inquiétèrent d’ailleurs pas, mais comme ils avaient de l’humour, ils me prénommèrent William, un prénom américain avec une arrière-pensée française…cela avait son charme. »
Très tôt, William va connaître les voyages. Il part avec ses parents pour les USA, et dans l’Ohio, notamment, il va découvrir un monde musical assez exceptionnel. Pour le jeune gosse qu’il est, il s’agit bien entendu d’une première aventure, mais cela aura son importance.
– « Mon père était contrebassiste amateur, ajoute-t-il, mais cela ne l’empêcha pas d’avoir parmi ses amis des hommes comme Gillespie ou Kenny Clark. De temps en temps, ils jouaient ensemble. Et c’était très beau pour le gosse que j’étais. »
De retour en France, William va connaître une autre aventure musicale, elle aussi. Il accompagne son grand-père à l’Opéra et découvre un monde surprenant. Les coulisses, les cintres, les loges, mais aussi Mozart, Berlioz, Stravinski, sans oublier les grands orchestres symphoniques. Tout cela le marque énormément, et très vite, il manifeste l’intention de suivre des cours de piano. Comme sa grand-mère insiste, ses parents l’autorisent à suivre lesdits cours. William a dix ans. Cinq années plus tard, il compose déjà ses premières chansons et décide de quitter définitivement le lycée, pour approfondir ses connaissances musicales. Ainsi il s’initie, avec l’aide des plus grands professeurs, à la composition, à l’orchestration, l’harmonie et le contrepoint.

L’influence des courants musicaux

– « Je suis un sensuel, confesse-t-il. Pour moi, tout ce qui m’apparaît beau et intéressant, mérite la peine d’être vécu. Pour la musique, j’ai très vite éprouvé le besoin de connaître tout ce qu’elle pouvait donner. Ainsi, j’ai commencé avec des études musicales tout ce qu’il y a de plus classiques, pour quitter tout délibérément, après avoir simplement entendu les Beatles chanter Help. La pop-music a été mon deuxième domaine d’exploration et sans le savoir, avec elle, j’ai préparé ma future carrière. »
1966 : William écrit de nouvelles chansons d’inspiration rock très remuantes et proches des orchestrations des Stones, des Beatles et de Who. Dans cette aventure où il n’a rien à perdre, il découvre enfin quelque chose d’important pour lui :
– « Ma culture musicale classique, mise à l’époque à contribution pour la pop et le rock, me permit d’entrevoir autre chose. Je m’aperçus ainsi que la musique classique était populaire, comme le rock et que seule l’époque d’inspiration changeait. Très vite, je me suis donné totalement à l’aventure – le jeu en valait la chandelle – et j’ai essayé de combiner ces deux courants musicaux. Et puis j’avais devant moi un encouragement de taille, avec Gershwin et le Jazz. »
1968 : William travaille pour les autres. Il compose My year is a day pour les Irrésistibles, plus la musique du film Erotissimo. Deux ans plus tard, chez CBS, il enregistre un premier album personnel, Lux æterna où, de retour à ses inspirations classiques, il se livre à un véritable d’harmonie et de tendresse.
Mais, il lui manque quelque chose. Ce quelque chose se produira par le plus grand des hasards, en la personne d’Alain Suzan, le leader du groupe Alice. Les deux hommes (le classique et le moderne) se découvrant des liens très étroits sur le plan musical. Reste à les unir sur le plan musical. Reste à les unir et à les mettre en microsillon. Après deux années de travail sérieux, William produit son premier 30 cm chez Philips. On connaît la suite. Aujourd’hui, en moins d’un an, il a obtenu la rançon d’un succès mérité. Présent dans de nombreux hit-parade, il voyage beaucoup et continue à travailler pour cette recherche musicale, qui, dit-il, n’a pas de fin :
– « La musique, c’est comme la vie. On la découvre tous les jours. Tantôt rose, tantôt bleue, elle ne demande qu’à être comprise. Je crois qu’il me reste encore beaucoup de choses à faire et à dire, pour arriver à cette musique universelle dont je rêve, et qui est tout simplement celle des hommes, quelles que soient les époques. »