Télérama N°1583
17 au 23 mai 1980

Musique en tête
Chansons

William Sheller. Nicolas.
Philips 9101291
(par Lucien Nicolas)



Les plages instrumentales de ce disque rappellent que les premières amours musicales de Sheller furent classiques, même si le compositeur a du, par la suite, mettre un peu de ketchup dans son vin. Ça a donné de subtiles chansons laquées et parfumées. Le garçon lui-même est fin, froid, drôle, swing, un peu snob-kitsch à l’anglaise. Il tient la bride serrée à l’amour et à l’émotion. Il a parfois (pour la scène) de surprenantes échappées de geste, et toujours (pour l’écriture) une immense pudeur d’expression. Le titre de Oh ! j’cours tout seul  montre comment la pudeur et le calembour s’organisent pour dissimuler le désarroi. De même, Billy nettoie son saxophone pour oublier un chagrin d’amour, et le petit Nicolas ne veut pas rester là où on le conduit : c’est la même matière cristalline, allusive, si transparente qu’on finirait par ne plus voir que la musique à travers les mots. Comme à travers la musique, on finit par ne plus voir les chansons, mais la personnalité d’un garçon qui, c’est sûr, ne se limitera pas éternellement à ces exercices très réussis.