Le Figaro N°13444
20 novembre 1987
-Spectacle au Grand Rex, 18 au 24 novembre 1987-

William Sheller
Rentrée loupée

(par Jean-Luc Wachthausen)

 

Mais qu’est donc venu faire William Sheller  dans cette galère du Grand Rex, aussi adaptée à son style intimiste et romantique que Bercy peut l’être à un récital de poésie ? Funeste erreur qui lui coûte son nouveau spectacle et du même coup sa rentrée parisienne dont il n’avait pas ménagé la promotion.
Et pourtant avec son allure de Tintin lunaire, sa défroque de dandy fragile, on aime bien ce compositeur tout à fait original qui se démarque du lot commun, cultivant avec bonheur cet art subtil de la fugue à une voix, avec des mélodies et des textes délicats, de facture classique. Une sorte de petite musique de nuit qu’il entretient avec bonheur sur le vinyle du disque, comme en témoigne son dernier album Univers, mais qu’il ne réussit pas à recréer sur scène.
Manque de rythme, sono déplorable, décors d’un mauvais goût qui frôle le hors-jeu, entrée et sortie de scène complètement nulles : difficile de suivre les errances de ce chanteur à la voix blême, malgré la présence d‘un quintette à vent et d’une bonne section à cordes. Quel gâchis !
Impossible de goûter cette série de chansons nostalgiques (Le Carnet à spirale, Les petites filles modèles, Oh ! j’cours tout seul, Chanson lente, Darjeeling, Basket-ball) qu’il enchaîne dans une atmosphère pesante.
Aucune respiration, aucun éclair de gaieté. Le charme ne passe pas la rampe, et c’est vraiment dommage pour William Sheller qui n’est pas un homme de scène, mais un artiste de talent qui manque de tripes mais pas de cœur.

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Grand Rex, 20 h 30 (jusqu’au 24 novembre).