Poète et musicien, lauréat des  Victoires de la musique, William Sheller débarque chez Nagui avec son nouvel  album, Albion. (Taratata,  France 2, 22 h 35).
      
      Aurait-il tous les dons, lui qui évolue du classique au rock, de la  chanson de variétés à la musique de film, en prouvant, après s'être amusé à  mettre du ketchup dans son hamburger, qu'il sait être poète ? Quelquefois  voyant dans ses tenues vestimentaires, William Sheller est discret dans la vie.  C'est planqué dans les coulisses avec ses cigarettes, à la soirée des Victoires  de la musique, qu'il a appris qu'il était sacré compositeur de l'année pour la  musique de L'écrivain public. C'est  aussi dans la solitude d'une ferme anglaise, Ridge Farm, qu'il a concocté son  dernier CD, Albion. Seul, parmi les  moutons, perdu dans le temps, il a, comme toujours, trouvé sa musique avant les  paroles, qui ne viennent qu'en dernière minute. Cela donne certaines chansons  nostalgiques comme Les enfants sauvages ou  On  vit tous la même histoire. Jamais à court d'inspiration, il prépare pour  Pleyel une symphonie qui sera jouée à Paris en mars. Infatigable, il a animé un  stage de composition à Bourgoin-Jallieu, près de Lyon. « C'étaient des mômes de 20, 27 ans qui, pour les trois-quarts, ne  savaient pas lire la musique. Il a fallu trouver un langage commun situé dans  l'abstrait. Ils composaient à la guitare, au piano, sur ordinateur. Avec leur  matériel obsolète, ils arrivaient à faire des choses. Je me suis dit que, avec  celui dont je disposais, je devais me bouger plus que ça ! » 
      De qui tient-il tous ses dons? De sa grand-mère qui chantait dans un saloon, ou  de son père musicien de jazz américain, ami d'Oscar Peterson ? Ou peut-être de  sa fréquentation, tout jeune, des coulisses de l'Opéra de Paris où son  grand-père créait les décors ? « Je  voyais l'opéra du haut des cintres. Et les grosses dames qui chantent avec un  casque et une lance, vues d'en haut, donnent de l'opéra une image plutôt  marrante. J'avais envie d'une musique qui fasse remuer tout ça. Cette envie ne  m'a  jamais quitté. » A 15 ans,  faisant fi du lycée, il apprend la composition avec un élève de Gabriel Fauré.  Il va aux cours, rentre chez lui, il est toujours seul. 
      
      Avec la Duchesse 
      
      Par quel hasard devient-il chanteur ? C'est la Duchesse (Barbara) avec laquelle  il travaille, qui lui conseille de chanter lui-même ses chansons. 
      Une bonne idée ! Cela donne un tube (« Donnez-moi,  madame, s'il vous plaît...) Comment voit-il la musique? « Ce que je fais, c'est du faux classique. Je  suis peut-être mégalomane avec mes envies de machins énormes, mais j'ai été  formé dans le respect de ces choses-là. Je n'écris pas au-dessus de ce que je  peux faire.» A la fois classique et moderne, le créateur de « Je suis un homme heureux » n'aime pas le  clip, même si Mon Dieu que j'aime a  reçu le Prix de la meilleure réalisation européenne au MIDEM85. Il préfère « l'imaginaire à l'image ». Prolifique  compositeur et auteur de talent, justement récompensé et aimé, Sheller dévoile  peut-être sa vraie nature dans ces paroles: « Qui connaît ma nature, peut témoigner sans peine, de sa réserve  extrême. »  
      
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      NB : l’émission a été diffusée le soir-même, samedi 19  février 1994