Il fait partie de ces vedettes que la célébrité
harasse, qui ne sacrifient à la promotion de leur prochain spectacle (en
l’occurrence un Olympia jusqu’au 30 octobre) que contraintes par une
taraudante conscience professionnelle et l’insistance de leur service de
presse. Lui, William Sheller, tout ce qu’il aime, c’est son tête-à-tête
avec l’ordinateur sur lequel il compose inlassablement; jugez de la
perturbation quand un journaliste déboule pour emboucher à son propos
les trompettes de la Renommée !
L’accueil, plutôt
frisquet, donnerait des engelures à un Esquimau. Il a une brosse de cheveux
pâles, des joues creuses et l’œil polaire, on dirait qu’il
débarque d’ailleurs et, visiblement, il a du mal à se remettre
du décalage horaire. Il se pose la question : «Comment peut-on
être à la fois musicien et vedette ?» Oui, comment ?
Espérons simplement que ses droits d’auteur et ses disques d’or
l’aident vaille que vaille à surmonter cette brûlante interrogation
existentielle.
Il vous livre des bribes : «Je dois maintenant
opérer un tournant, mais humain plutôt qu’artistique, c’est-à-dire
m’investir de moins en moins dans le paraître». De ce côté-là,
il est incontestablement bien parti.
Sur la scène de l’Olympia,
il sera entouré d’une vingtaine de musiciens, avec son fils Siegfried
à la guitare électrique. Ce qu’il veut : surprendre,
se lancer, d’une scène à l’autre, d’un disque
au prochain, dans des aventures à rebrousse-succès. «J’ai
besoin d’être nomade pour éviter la rouille, ne pas me caricaturer
moi-même… Je suis musicien comme on peut être cuisinier. Un
cuisinier ne fait pas que des plats principaux…»
Il a chanté
qu’il voulait être un homme heureux. Il est surtout un homme solitaire :
«C’est une sorte de fatalité quand on est musicien :
on plane tout le temps avec un air de musique dans la tête, c’est
à peine si on s’aperçoit qu’il y a quelqu’un à
côté de soi». C’est ce qu’on avait cru remarquer. 