Sud presse (groupe)
9 novembre 2000
-concert avec orchestre au Palais des Beaux-Arts de Charleroi le 7 novembre 2000-

PBA/William Sheller en concert
L'humble magnificence d'un rock’n’symphoman

(par Patrick Vanesse)



Qu'il soit seul au piano ou entouré d'une vingtaine de jeunots virtuoses, William Sheller, simple et grandiose et à la fois, nous donne plus que jamais l'envie de le suivre... Aveuglément.
Fils spirituel de Barbara, de Bach et des Beatles, William Sheller a résolu -et avec quelle maestria !- l'équation impossible : concilier « grande » musique et variété, cordes et machines, jeans et queue de pie, simplicité du geste et raffinement des arrangements.
Après une tournée de printemps prolongée par des apparitions remarquées et remarquables au cours des festivals d'été (dont les Francofolies de Spa), l'électron libre de la chanson française a décidé, pour cet hiver, de continuer à se chauffer au bois des scènes. Sans doute, pour un artiste la plus économique des énergies. En tout cas, la plus chaleureuse, à entendre, mardi soir, les réactions gonflées d'enthousiasme du public carolo.
Cauchemar des colleurs d'étiquettes, Sheller l'éclectique aime aussi varier les plaisirs que lui procurent ses apparitions publiques. Après une tournée en solitaire, qui s'est d'ailleurs terminée dans le velours de la grande salle du Palais des Beaux-Arts de Charleroi (en avril 1999), Mister Symphoman est revenu, accompagné par une vingtaine de jeunes musiciens, tous belges, qui nous prouvent que la décontraction vestimentaire, sur une estrade classique, n'est pas du tout incompatible avec le talent...

Vingt-cinq ans dans le rétro

Après des salutations d'usage, sans chichis ni tralalas, mais avec une générosité déjà perceptible, la formation Sheller nous a montré d'emblée toute l'étendue de son art. Toute la richesse des arrangements de leur compagnon chanteur aux traits juvéniles et ronds comme une bouille de Tintin, malgré 54 berges affichées au compteur de la vie. William le Symphoman shoote dans des boîtes de bémol et lobe nos cages à miel d'un coup de pied constamment magistral.
Fort curieusement, il ne s'est pas étendu sur les plages de son dernier album, Les Machines absurdes. Ne s'aventurant qu'entre les dolmens de Moondown, pour une ballade lunaire. Et ne s'enfonçant dans la jungle profonde d'Indies que pour charmer un serpent imaginaire au son d'harmonies rock-hindoues. Sheller a préféré nous balader sur vingt-cinq années d'une carrière riche et atypique. Déterrant même parfois des chansons qu'ils n'avait plus ou pas l'habitude d'interpréter sur scène, comme Les orgueilleuses en hommage à Barbara ou Relâche à l'atmosphère fellinienne.

Accord parfait

S'il est apparu un peu perturbé en première partie de concert, dérapant sur quelques-uns de ces textes (en fait, nous expliquera-t-il, ces insignifiants moments d'absence étaient dus à l'émotion suscitée par la présence de son père dans la salle), William Sheller a donné le meilleur de lui-même après l'entracte. On retiendra surtout son « bricolage » country pour quatuor à cordes sur Un archet sur mes veines, les notes du Carnet à spirale recopiées pour son sextuor à vent et la version époustouflante de Excalibur clôturant, avant d'interminables rappels, le concert inaugurant sa tournée belge.
Subjugué par l'accord parfait qu'il a su faire naître entre l'ensemble classique et la rythmique moderne (guitares, basse, batterie), le public carolo debout n'a pas voulu lâcher de sitôt l'Artiste (avec majuscule sîouplaît). Un homme heureux pour piano et trompette, un Rock’n’dollars trépidant à souhait et un Quand j'étais à vos genoux  à l'orchestration baroque ont bouclé une prestation d'ensemble absolument sublime. C'était se mettre à genoux, Monsieur Sheller.
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William Sheller sera ce soir au Forum de Liège.