Le Figaroscope
26 janvier au 1er février 2005

William Sheller aux Folies-Bergère
Une si belle mélancolie
(par Annie Grandjanin)



Derrière ses allures faussement désinvoltes, William Sheller est un passionné. Depuis la sortie des Machines absurdes en 2000, il a assuré une longue tournée, sorti un album de pièces pour quatuor interprétées par le Quatuor Parisii, enregistré son concerto pour trompette avec l'Orchestre national de Lyon dirigé par Michel Plasson, créé une symphonie aux festival classique de Sully-sur-Loire... et enfin, il a écrit et composé Epures, un album piano-voix qu'il présente, accompagné d'une vingtaine de musiciens, aux Folies-Bergère. Rencontre avec un homme simplement heureux.


- "Epures est un album assez sombre ?"
- "Pas du tout ! Quand on écoute Lynda Lemay et bien d'autres qui racontent des histoires de gens qui pleurent et meurent, moi, c'est juste une petite mélancolie douce. Les artistes sont des témoins de leur temps, de leurs voisins, de ce qu'ils voient dans la rue. Ce sont des miroirs. Quand on voit de la tristesse, c'est que l'on n'est pas bien. Les jeunes d'aujourd'hui ont des textes bien plus désespérants. A côté, moi je me sens fort joyeux !"

- "Un peu moins dans l'exercice de l'écriture ?"
- "C'est une horreur ! Ce qui me rassure, c'est que Colette disait également que c'était une souffrance. En fait, je n'ai aucune personnalité d'auteur, alors je m'amuse avec des climats. Mon Hôtel, je l'ai traité à la Baudelaire mais ça tire aussi du côté d'Anna de Noailles, deValéry, de Cocteau. Mais qui lit encore Anna de Noailles ?"

- "Vous n'êtes pas tenté, comme votre amie Catherine Lara, de composer une comédie musicale ?"
- "J'ai un projet secret. Je voudrais faire le Christmas Caroll de Dickens. Mais ce ne serait pas une comédie musicale, plutôt un opéra pour la jeunesse, à la Britten. J'ai envie de ça".

- "Les Folies-Bergère, c'est la première fois ?"
- "Oui. J'aime le côté baroque de cette salle. J'y retrouve ma famille de musiciens. Ceux qui étaient avec moi il y a cinq ans. C'est un grand groupe, ils se déplacent et pour cela, ils ont accepté d'apprendre tout le répertoire pratiquement par coeur. J'ai adoré travailler avec le Quatuor Parisii. Voilà des classiques qui se mouillent, comme Casadesus ou Plasson".

- "Vous étiez destiné au prix de Rome. N'avez-vous jamais regretté ce changement de trajectoire ?"
- "Non, surtout si c'était pour me retrouver à faire de la musique contemporaine à tout va. Ce n'est pas mon truc. Pourquoi me frustrer de toutes les musiques que j'aime pour être un nouveau Dusapin ?"

- "Quelles sont ces musiques ?"
- "Le classique, le rock, la variété.. même certains trucs en techno que me fait découvrir mon fils. Je continue à dire que les trois œuvres qui ont été importantes dans ce siècle, sont : Le Sacre du printemps de Stravinsky, Sergent pepper's, des Beatles, et Le Marteau sans maître, de Boulez. Elles ont fait réfléchir des musiciens".

- Vous fêtez trente ans de chansons. Vous ne craignez pas l'album de trop ?"
- "Non, je n'ai peur que du silence, de ne plus rien entendre".

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Folies-Bergère, du 1er au 12 février à 20 h 30.