L'Est républicain
10 mars 2005
-Concert du 9 mars 2005 au Zénith de Nancy-

Un soir avec Sheller
(par Benoît Gaudibert)



1.500 personnes se sont lovées dans les mots et les mélodies à cordes et à vents de l'alchimiste chanteur, hier au Zénith.


Gamin, William Sheller venait visiter sa grand-mère à Nancy. «Elle avait une copine à... Saint-Max ?», révèle au public du Zénith le chanteur, jamais avare d'une confidence ou d'une anecdote entre deux chansons. Drapé dans des halos de lumières monochromes, rouges, bleues ou jaunes selon la couleur musicale des compositions, un ensemble de dix-huit musiciens à géométrie variable illustre ses petites histoires. Certaines sont nées d'un souvenir d'enfance, d'autres de la vision d'un paysage. Bienvenue au pays des merveilles de Sheller, cet univers atypique aux tons pastel, dont l'atmosphère oscille entre la joie contenue et le spleen.

1.500 spectateurs ont plongé hier dans les songes de l'artiste, qui entre chaque morceau donne quelques clés de compréhension de la chanson qui va suivre. Il est question d'images, de couleurs, d'odeurs «tombées» un jour dans son piano, de toutes ces petites choses qui fabriquent des souvenirs, des bouts de vie. Réunis sur scène, les dix-huit musiciens interprètent des compositions aux orchestrations amples, limpides comme l'eau claire. A d'autres moments, certains s'effacent, et ils ne sont plus que deux, quatre ou six à se lover dans les mots de Sheller. La musique classique se fiance avec des influences plus pop. Quand il n'est pas assis derrière son piano, le chanteur à la tunique arpente la scène en déployant ses bras, comme s'il flottait dans ses douces mélodies. Les fans se laissent porter au gré des cordes et des vents.

Des versions superbement arrangées du «Capitaine», du «Carnet à spirale», des «Miroirs dans la boue», de «La Tête brûlée» ou de «To You» constituent le répertoire de ce concert entrecoupé d'un entracte, au fil duquel ce compositeur à part revisite trente années de chansons sans compter son temps. Si l'application est réelle, cela n'exclut pas quelques instants de fantaisie, et jamais cette soirée raffinée ne tombe dans l'excès de la préciosité. En savant alchimiste, William Sheller maîtrise sur le bout de ses touches l'art du dosage et de la bonne mesure.