La Dépêche du Midi
10 juillet 2014
- interview avant un concert au théâtre Jean Deschamps de Carcassonne-

William Sheller, un homme heureux ce soir à la Cité : "J'aime la musique qui m'emporte"
(par Pascal Charras)


Discret mais incontournable sur la scène musicale française, William Sheller est un touche-à-tout : « Les classifications et les barrières me sont indifférentes, explique-t-il, j'aime LA MUSIQUE. »

- La Dépêche du Midi: « On vient de commémorer le 70e anniversaire du Débarquement en Normandie; cela fait un peu partie de votre histoire, vous qui êtes né d'un père soldat américain : est-ce-que cela a eu une résonance particulière pour vous ? »
- William Sheller : « Forcément et comme bien des enfants nés d'une importante période d'histoire. La double culture, la double éducation, la pensée du langage aussi. Cela m'a influencé musicalement et dans les deux sens. Le jazz aux USA et le classique en France. Comme je dis quelquefois, à force d'avoir l'impression inconfortable d'être assis entre deux chaises, je m'en suis fait une avec les morceaux des deux autres. »

- LDM : « Vous êtes de formation classique, mais sans vous y cantonner : que pensez-vous des expressions modernes de la musique, comme la techno, le rap, le format Mp3, la vente de morceaux au détail sur internet ? »
- WS : «Vaste sujet… J'aime LA MUSIQUE, celle qui m'emporte. Les classifications et les barrières me sont indifférentes. La techno a beaucoup apporté dans la création sonore, mais cela dépend des "créateurs". Rien n'est pire que ce qui est prémâché par des logiciels. On ne crée rien de nouveau avec du copier-coller. Le rap est fils de la techno, il y a du très bon comme du pire. Le Mp3 n'est pas l'idéal en terme de qualité acoustique, mais permet d'emporter sa musique préférée facilement et n'importe où. Je l'utilise sans problème. Quant à la vente au détail, lorsqu'on a comme aujourd'hui beaucoup d'albums où l'on trouve un bon titre alors que le reste est du remplissage, ce n'est pas plus mal.»

- LDM : « Est-ce que vous aimeriez, par exemple, écrire pour, chanter du, ou chanter avec Björk ? »
- WS :« Ah. Drôle de question! Je l'ai beaucoup écoutée, appréciée, aujourd'hui je l'ai un peu perdue de vue je l'avoue. Il y a dix ans j'aurais dit oui de suite. »

- LDM : « Vous vous êtes produit avec un orchestre symphonique, puis en solitaire piano-voix, aujourd'hui avec un quatuor à cordes, auquel vous revenez : est-ce que c'est là la formation ultime, parfaite, un peu comme le power trio dans le rock ? »
- WS : « J'y reviens de temps en temps. Besoin d'épuration. Le quatuor est généralement donné comme étant effectivement la formule la plus parfaite, et la plus difficile à écrire, ce dont je ne suis pas sûr. Oui, comme le power trio dans un autre style. Une épuration où finalement rien ne manque.»

- LDM : « A Carcassonne, vous vous produirez dans le cadre d'un plateau d'artistes où vous succèderez sur scène aux sœurs Labèque : qu'est-ce que cela vous inspire ? »
- WS : « Du bonheur ! J'avais eu l'occasion de les rencontrer au cours d'un festival où j'ai eu le plaisir (et la trouille !) de jouer avec Katia une polka de Stravinski à quatre mains. J'aime leur éclectisme. Je suis heureux de les retrouver.»

- LDM : « Quel est votre moment préféré dans l'espace d'un des concerts de cette tourné ? »
 -WS : « Quand je laisse le quatuor jouer seuls une petite pièce, cela me permet d'aller en coulisses boire en douce un coup de rouge du crû… Non, je plaisante! C'est quand le concert commence : je ne suis plus là, je suis dans le piano, dans les histoires que je chante. »