La Dernière Heure
2 mars 2016
- concert du 1er mars 2016 au Cirque royal de Bruxelles -

Musique
Sheller dans les cordes
(par Nicolas Capart)


William Sheller passait par Bruxelles cette semaine. Retour sur une prestation en demi-teinte.

C'est avec un mélange d'impatience et d'appréhension que William Sheller était attendu ce mardi au Cirque Royal. Récemment victime de quelques sérieux pépins de santé, le chanteur français avait bien failli annuler un temps cette tournée. A 69 ans, cet orfèvre de la mélodie nous revenait il y a peu avec un superbe 13e album – Stylus – sous le bras, et toujours cette voix d'une beauté rare et d'une douceur singulière qui n'a pas changé d'un iota. Un disque réalisé avec le concours d'un quatuor à cordes, une envie qui le taraudait depuis 2007 et son live avec le quatuor Stevens

Comme pour nous assurer qu'il tient la forme, c'est au trot de J'cours tout seul que notre hôte entame ces deux heures de concert (serties d'un entracte court mais salvateur). Non sans nous avoir expliqué d'emblée que se jouait ici la der' des der' à cordes – pour la Belgique – de sa carrière. Sheller a meilleure mine que lors de sa dernière apparition télévisuelle aux Victoires mais paraît malgré tout vieilli. L'homme est en tout cas très bavard, et régale un public de fan de ses digressions nostalgiques pour introduire chaque morceau. Un peu longues parfois. L'anecdote d'Yvonne et de sa maison "qui puait le poireau" juste avant Nicolas, celle d'une vieille carte postale pour Cuir de Russie  ou celle de ce gamin chantant qui l'exaspérait pour Maman est folle.

Expert en ascenseur émotionnel, Sheller reste à la fois drôle et touchant. Il fait rire l'assemblée quand il évoque ses voyages dans le Sud et son incompatibilité au soleil – « Z'avez vu la bobine ? C'est pas mon biotope ! » – , puis nous émeut l'instant suivant au détour d'un couplet. Quand il nous parle de Barbara notamment, celle qui le poussa au chant, dont il reprit jadis Vienne avec pudeur et élégance (à l'inverse de Bruel qui massacrait son répertoire récemment), et qui lui inspira Les Orgueilleuses, un moment suspendu de ce concert bruxellois.

A deux reprises, le chanteur et ses touches s'effacent pour laisser aux cordes toute la place (sur les instrumentaux Babayaga et Pepperland), puis déambule et chante sans l'apport du piano. C'est dans ses moments-là que se ressentent les failles. Sheller perd parfois le rythme, s'emmêle un peu les pédales. Comme sur le blues catastrophique d' Un archet sur mes veines, pour le moins accidenté, ou plus tard – et assis – sur son dernier single Youpylong, dont il oublie le texte qu'il émaille de faussetés.

S'il promet de revenir, c'est sans doute la dernière fois que nous irons l'applaudir. Les meilleures prestations de Sheller sont derrière lui et parmi nos souvenirs. Mais ses classiques font toujours mouche. Mardi, Le Carnet à Spirales, Fier et fou de vous, l'incontournable Un Homme Heureux et les irrésistibles Filles de l'Aurore nous auront encore percutés de plein fouet.

William Sheller sera ce jeudi au Forum de Liège.